De son enfance en Bulgarie, Sylvie garde le souvenir des spectacles qu'on l'emmenait voir. Des histoires de sorcières, de châteaux hantés, de dragons...Son ADN conserve l'empreinte du monde slave, de ses icônes, et le goût des costumes de théâtre.
Plus tard en France elle découvre le cinéma américain, Charlot, les péplums, les actrices hollywoodiennes. L'envie naît d'être à son tour l'une de ces héroïnes qui vivent des aventures et des amours plus intenses que dans la vraie vie.
Devenue chanteuse "par hasard" et trouvant l'exercice du seul tour de chant peu gratifiant, très tôt elle a l'idée "de se mettre en scène". Les souvenirs du passé, qui s'imposent à elle, vont prendre vie le temps d'une soirée...
Son univers tourne autour des grandes héroïnes de toutes les époques et tous les archétypes de la femme fatale y passent. Tour à tour elle sera Jeanne Harlow, Mata Hari, Dédé d'Anvers, l'ange bleu, la reine de Saba....
La danse est un élément qui s'intègre dans une mise en scène faite de lumières, de costumes, de théâtralité. Dès la fin des années 60, pour incarner divers personnages, Sylvie Vartan fait appel à plusieurs styles de chorégraphies. En 1968 elle fait des claquettes, en 1969 on la voit jerker avec la même évidence en Italie...
Féline et sensuelle avec Jojo Smith, chaloupant aisément avec ses danseurs venus de Harlem, le corps s'abandonne à plus de souplesse au rythme de la musique syncopée des ballets...
Plus tard sous la direction d'Howard Jeffrey, son imaginaire la porte vers tous les styles de musique. Elle passe du numéro très comédie musicale dans "Pour lui je reviens" au duo burlesque avec Carlos dans "Dilindam". Dans les costumes d'Yves Saint-Laurent, elle devient tour à tour Ange bleu, lascive entraineuse pour matelots, passant ensuite de la sensualité aggressive de la Blacksploitation pour "Shaft" à l'énergie du rock pour "Proud Mary". C'est parée de l'éclat du noir qu'elle termine aux accents des chanteuses réalistes.
On retrouve cette Sylvie "caméléon" dans les shows italiens de "Punto e basta". Une dizaine de ballets différents dans lesquels elle révèle toute la palette de ses talents de danseuse. Le ballet le plus complexe, "Da dou ron ron", est aussi le plus rock de tous. La cadence imposée par les danseurs rompus à cet exercice n'est en rien une difficulté pour elle.
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C'est en 1975 au Palais des Congrès qu' elle créée son ballet le plus théâtral, "La drôle de fin", un tango parodique où pour la première fois elle incarne "la femme fatale absolue"...
Les amoureux de la Sylvie des premières années constatent le changement, voyant leur idole leur échapper. Sur la scène du Palais des Congrès les ballets se déploient désormais à une autre échelle...
Pour la Star, aucun risque d'être écrasée par la scène ni par la troupe de danseurs. Elle se nourrit de son narcissisme pour devenir le personnage autour duquel on danse.
C'est un changement radical. L'enjeu n'est plus de spécialement de bien danser, mais d'être le point de mire de tous.
Si on compare "Tout l'bazar" à "Lui", deux ballets aux thèmes similaires, la différence est sensible.
La proximité avec le public de l'Olympia permettait une évocation dansée très sexuelle. .
Au Palais des Congrès, la vérité du personnage ne vient plus de l'intériorité mais de la mise en scène du ballet.
Le style des tableaux n'est pas sans faire penser aux bas reliefs égyptiens, où tout doit être vu et compris d'un seul coup d'oeil...
Dès son entrée en scène le regard de la chanteuse embrasse d'un seul coup l'immense salle comme si elle fixait l'horizon.
En 1977 jamais un spectacle de musique pop n'avait mélangé danse et chanson à cette échelle,
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Sylvie Vartan , 50 ans de scène : Florilège
Conception vidéo et montage sylvissima.com
© 2011
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ni en France, ni même aux Etats-Unis... Sylvie Vartan est la pionnière d'un style qui "fera école"...
Pour elle, il s'agit de projeter sa personnalité et de se confondre avec son spectacle. La fusion s'opère et Sylvie Vartan devient "Dancing Star", le rêve devient réalité...
Cette vision de l'artiste n'est pas sans faire penser à d'autres stars comme Barbra Streisand, pour qui les concerts ou les films sont les véhicules d' une vision fantasmée de leur vie.
Comment incarner ses rêves d'enfant mieux qu'en les réalisant devant témoins?
De spectacle en spectacle Sylvie Vartan créée un style, le développe, l'enrichit de nouveautés, l'alourdit parfois.
En 1983 pour "Raining men", vêtue d'une cape dont les effets rappelent le Kabuki japonais, elle devient impératrice dévoreuse d'hommes. Son style se fige dans une parodie éticelante, celle du personnage qu'elle a créé. A la fin, comme à l'Olympia en 1972, elle revient à la simplicité et à l'émotion du récital...
Vu de l'extérieur, Sylvie Vartan a tout réussi, mais arrivée à quarante ans, a-t-elle senti le piège dans lequel tant d'autres avant elle s'étaient enfermées?
Un an après avoir passé trois mois au Palais des Congrès, pour la promo de son nouvel album "Des heures de désir", elle ressort ses plus belles robes avant de les enfermer définitivement dans leur malle....
Le moment est venu de faire une pause qui durera sept ans. Elle laisse à ses fans des images faites de beauté, de fantasmes et de lumière.
A ce jour certains restent nostalgiques du souvenir de ces vingt-cinq années enchanteresses. La décennie 90 sera celle du changement.
Sylvie Vartan va chanter dans le pays qui l'a vue naitre, elle en ressort transformée.
Dès lors elle n'aura de cesse de réconcilier le personnage de la Star avec la femme qu'elle n'a jamais cessé d'être
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Elle multiplie les aventures, les spectacles, se jouant des échecs et des succès...
Après cinquante ans de scène, en abolissant les barrières qui la mettaient à distance de ses émotions, elle passe du rang de Star à celui de Diva...
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